INCIVISME ROUTIER DANS LE MACKY

INCIVISME ROUTIER DANS LE MACKY

Dis-moi comment tu (te) conduis, je te dirai qui tu es !

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L’exception sénégalaise :

Il est de bon ton de considérer le Sénégal non pas comme un pays à part entière, mais comme un pays entièrement à part.

Ainsi, les problèmes qui ont trouvé des solutions pérennes à travers le monde font ici l’objet de débats sans fin. C’est le cas de la circulation routière qui, fruit de l’urbanisation galopante et de l’émergence des classes moyennes, draine quotidiennement des torrents de véhicules dont la logique de fonctionnement défie le bon sens et illustre la théorie des rats :

- Isolés, ce sont des animaux sans histoires,

- Mis en communauté, ils laissent apparaître des signes d’organisation, voire d’intelligence,

-Plus ils se reproduisent, et plus cette organisation se perfectionne, jusqu’au seuil de surpopulation où ils s’entre-dévorent, revenant à l’état sauvage.

Le principe de base sur lequel se fonde la mobilité routière est que la route appartient à tout le monde, et elle doit être partagée en responsabilité, chacun prenant soin de l’outil et de son environnement. Il semble qu’au Sénégal, nous ayons pris le parti de considérer que la route n’appartient à personne, dès lors chacun y fait ce qui lui plait, en toute impunité.

Et ceux qui sont sensés veiller à l’harmonie du système sont souvent les premiers à lui porter des coups, soit par un usage abusif de leurs prérogatives, soit par une démission face à leurs responsabilités.

Les 10 péchés capitaux :

Le catalogue des « bonnes pratiques » est quasiment sans limite :

-La voie : On choisit son couloir selon sa sensibilité politique, donc majoritairement à gauche, et en changer reviendrait à se renier. Plutôt crever ! En revanche, s’il y a quelque espace ou intérêt à glaner à droite, on peut s’autoriser une incursion furtive, quitte à se rabattre sur un innocent ;

-La vitesse : Elle est définie par l’état d’esprit du conducteur sans tenir compte du panneautage et de son environnement. Cette remarque concerne particulièrement ces conducteurs de transports en commun âpres au gain, qui n’hésiteraient pas à rouler sur plus petit qu’eux pour gagner un client ;

-Les passages piétons : Purement décoratifs, zones à risques par excellence car si un conducteur averti s’arrête pour vous laisser passer, attention au crétin de service qui va accélérer et voyant un espace vide, fauchera sans états d’âme cette personne âgée ou cet enfant qui ne se doutait pas qu’on pouvait croiser aussi bête et méchant par une si belle journée ;

-Les distances de sécurité : sacrifiées depuis belle lurette au profit de l’aspiration, supposée réduire la consommation et faire gagner du temps. A vouloir chasser le dernier centimètre, en ville comme sur autoroute, le moindre écart ou ralentissement se transforme en carambolage ;

-La priorité aux intersections : Le casse-tête par excellence entre la priorité à droite, la voie à grande circulation et l’avantage donné sur les rond-points au véhicule déjà engagé. La confrontation donne droit à une guerre des nerfs où celui qui a la priorité avance à pas feutrés, parce que celui qui doit lui laisser l’avantage continue d’avancer insidieusement, fermant l’angle jusqu’au point de contact. Il serait tellement plus simple de marquer son intention de laisser l’avantage quelques mètres avant l’intersection en ralentissant clairement, et s’arrêter à la ligne blanche qui la délimite…

-Le téléphone au volant : Les sénégalais seront comblés le jour où une application leur permettra de conduire leur véhicule à partir de leur smartphone. On a beau leur dire que l’hémisphère du cerveau qui gère la conversation téléphonique est le même que celui qui gère la conduite et qu’entre conduire et téléphoner, il faut choisir, ils restent convaincus d’être assez brillants pour combiner les deux. Résultat des courses, chaque fois que vous voyez une voiture quitter sa ligne ou décrocher sa vitesse sans raison apparente, regardez à l’intérieur, vous y verrez un écran allumé et un conducteur en train de « régler des problèmes », au risque de vous en créer…

-Le sens giratoire : Pourquoi diable faire le tour d’un rond-point pour prendre la bretelle à gauche alors qu’elle nous tend les bras, Quitte à se trouver nez-à-nez avec ceux qui arrivent dans le bon sens ? La question reste sans réponse…

-L’arrêt et le stationnement : Ce qui restait la spécialité des taxis a basculé dans le tronc commun : rétroviseur, clignotant et feu de stop sont ravalés au rang d’encombrants, on s’arrête où et quand on veut, sans préavis, et comme en cas d’accident, celui qui est derrière est déclaré fautif pour n’avoir pas respecté la distance de sécurité, la messe est dite. Sauve-qui-peut ;

-La conduite sous la pluie : quelle pluie ??? Les voitures et les conducteurs étant étanches, on ne change rien, ni la vitesse, ni les distances de sécurité, pas même les essuie-glaces ;

-La conduite de nuit : Voir et être vu présuppose des phares bien réglés, utilisés en mode « feux de croisement » alias feux de code. Dans la pratique, et surtout sur route non éclairée et autoroute, il est de bon ton de rouler en phares, surtout si on est au volant d’un 4x4 surélevé afin qu’aucun détail de la route ne nous échappe, au risque d’éblouir ceux qui nous précèdent ou nous croisent.

N’en jetez plus, la coupe est pleine… Enfin, non !

Car il y a ces policiers qui règlent la circulation téléphone en main, laissant filer sous leurs aisselles un essaim de scooters et motos lestés de 3 équilibristes sans casque ni masque, qui se paient le luxe de brûler un feu rouge et une priorité dans l’indifférence générale, car se croyant exemptés de code ;

Sans oublier cette gestion fantaisiste de la circulation par la maréchaussée, qui s’éclate en libérant en simultané et non en alternance deux files de voitures opposées, qui ont la ferme intention de se croiser ET de se contourner – méli -mélo garanti ;

Et ces piétons qui débarquent sur le macadam sans crier gare, téléphone à l’oreille, en tournant le dos aux véhicules, s’en remettant à leur bonne étoile à défaut de couverture médicale.

Voilà comment un pays de Droit devient un pays de non-Droit.

La politique de contournement :

Ce capharnaüm est le triste résultat d’un anticonformisme congénital et contagieux, car les étrangers vivant au Sénégal, toutes origines confondues ont vite fait de se dépouiller de leur discipline acquise pour prendre le pli local comme s’ils l’avaient tété au biberon.

Preuve s’il en est que la discipline n’est pas innée, mais le fruit d’un conditionnement.

Dans un système normé, un accident est un incident survenu alors que tout a été fait pour l’éviter, il constitue donc par définition l’exception. Au Sénégal, au regard de l’état général des véhicules et du comportement des usagers de la route, l’accident constitue la règle, la suite logique de comportements erratiques répétés par des serial-gaffeurs. Rentrer chez soi sans une éraflure ou une aile défoncée relève du miracle quotidien.

Comment en est-on arrivé là ? Probablement par notre incapacité à s’autoévaluer, notre goût immodéré pour l’autosatisfaction, et cette conviction d’être plus malins que tous les autres peuples réunis, au point de trouver des parades « innovantes » à tous les problèmes classiques :

-Les automobilistes empiètent sur le bas-côté, transformant une 3 voies en 5 voies ? On met des trottoirs infranchissables. Résultat, plus de voies de dégagement, la moindre panne ou le moindre accrochage se traduit par 30 minutes de bouchons, puisque même les gendarmes et les secours ne trouvent pas d’accès aux lieux des sinistres ;

-Les rond-points sont des goulots d’étranglements ? On construit des ponts et des tunnels afin de supprimer les points de croisement, mais on laisse des centaines de marchands ambulants transformer une voie rapide en marché aux souks où on s’arrête pour négocier les prix ou attendre sa monnaie, annulant de ce fait des milliards de francs cfa d’investissements.

Pourtant, une rapide comparaison avec des pays candidats à l’émergence comme le Sénégal tels que le Ghana, le Rwanda, le Cap-Vert et le Botswana permettrait de comprendre que les solutions aux problèmes complexes sont souvent simples, et reposent avant tout sur une volonté politique inflexible, l’éducation des populations afin d’atteindre une masse critique de citoyens conformistes, et le refus de solutions en trompe-l’œil proposées par les bailleurs toujours prêts à vendre leur expertise à prix d’or, moyennant des montages financiers complexes « d’aide liée » qui au final, remontent l’essentiel de la ressource financière à la source sous forme de sociétés concessionnaires, honoraires de consultants et de formateurs, licences d’exploitation et tutti quanti.

La solution est en nous, individuellement et collectivement, à travers le retour à une conduite vertueuse et responsable, reflet d’une citoyenneté conquérante.

Le retour aux fondamentaux du code de la route :

Langage commun à l’ensemble des citoyens de ce monde, le code international de la route a été conçu pour prévenir toutes sortes de conflits entre les usagers, grâce à un catalogue de règles de conduite à appliquer sans interprétation, afin d’éviter les incompréhensions sources d’accidents.

La version francophone conçue par ce cher Monsieur Rousseau, pas celui de l’Encyclopédie, l’autre, est un best-seller sur lequel le temps n’a pas de prise, et qui a rendu service à des millions d’usagers.

Tout conducteur est supposé le maîtriser suite à un processus de formation en auto-école sanctionné par l’obtention d’un permis de conduire.

Dès lors, comment admettre que sitôt le permis obtenu, ces conducteurs reviennent à l’état primitif, sans foi ni loi ?

De même que les excès de vitesse ont été résolus par les radars et l’alcool au volant a été jugulé par l’alcootest, l’incivisme routier sera neutralisé par un dispositif répressif basé sur la force de la Loi et la pédagogie.

Ainsi, il convient de rétablir le code de la route dans ses prérogatives :

-Par une formation de mise à niveau des agents de police, de gendarmerie, les ASP et agents communaux afin de lever toutes les ambiguïtés quant à l’application de la réglementation routière ;

-La même démarche devra être menée auprès des entreprises de transport public et privé : taxis, bus, camions, des entreprises à flotte de véhicules lourds, ainsi que des corps d’élus et d’élite : gouvernement, députés, élus locaux, ordres des professions libérales, groupements professionnels d’employeurs et de travailleurs ;

-Par une campagne nationale de sensibilisation aux enjeux de la citoyenneté routière via la télévision, les radios, journaux et presse en ligne, les écoles, lycées et universités, à travers des spots didactiques et des tutoriels quotidiens afin que nul n’ignore les fondamentaux de la sécurité routière,

-Par une application stricte du code de la route, avec identification rigoureuse et impartiale des infractions, suivie d’une application sans complaisance des sanctions prévues par la loi, dans un souci permanent de pédagogie, de sensibilisation et de responsabilisation.

Et que l’on ne nous divertisse pas avec le spectre du permis à points, ce sera encore une fois l’occasion de nous refiler une technologie importée coûteuse et contre-productive, à l’image du défunt visa de tourisme. De toutes façons, la modicité des contraventions ne permettrait pas de rembourser l’investissement, et la multiplication débridée des conducteurs sans permis deviendrait vite une équation sans issue pour nos autorités.

D’autant que dans ce pays où chacun est à la recherche d’un parent bien placé en politique, dans l’administration ou dans les confréries pour lui régler ses problèmes, quitte à fouler les règlements du pied, les règles communautaires priment sur les règles de la République.  

Voilà comment un pays de non-Droit devient un pays de passe-Droit.

Ainsi donc, la solution devrait être recherchée dans la transition numérique, à travers :

-La généralisation des caméras de surveillance du trafic automobile, avec identification automatisée des infractions, couplée à la vigilance des agents de la circulation, et transmission des contraventions via les smartphones pour un paiement par transfert d’argent ;

-L’informatisation des permis de conduire incluant l’historique des infractions constatées, et un lien avec le téléphone personnel du conducteur afin d’assurer une bonne traçabilité ;

-L’élaboration d’une échelle des infractions avec des sanctions appropriées : pécuniaires pour les premières commises, puis assorties de travaux d’utilité publique : aide à la circulation urbaine avec la police, séances de sensibilisation dans les écoles ou nettoyage des rues avec les équipes de l’UCG.

Et en cas de conduite sans permis suite à un retrait pour multirécidive, incarcération en commissariat de police pour 24 heures, et plus si affinités.

Afin que cesse le règne de l’irresponsabilité et de l’impunité.

Dieggelou xeewina : l’appel à la responsabilité :

La manière dont on se conduit sur la voie publique est le reflet du niveau d’éducation et/ou de répression des citoyens. Il n’est donc pas étonnant que les pays scandinaves, du fait de leur haut niveau de citoyenneté, soient des modèles en matière de prévention et de responsabilité routière qui s’appuient sur des principes accessibles à tous : prévisibilité, bienveillance, courtoisie et responsabilité :

-On respecte les infrastructures, le mobilier urbain et l’environnement (voitures, piétons) ;

-On respecte son prochain et partage la route en bonne intelligence (bien commun) ;

-On annonce ce qu’on va faire (arrêt, ralentissement, changement de direction) et on s’y tient ;

-On s’abstient d’interpréter le code de la route, source de malentendus, pour une application stricte ;

-On s’assure et adopte un comportement responsable en toutes circonstances : on casse, on paie !

Le Sénégal pourra prétendre être sur la rampe de l’émergence le jour où ses citoyens auront intégré le fait que leur attitude au quotidien, notamment sur la voie publique, est le reflet de leur prise de conscience de leurs droits et leurs devoirs. Elle traduit leur capacité à vivre en société en bonne intelligence, avec un objectif commun tendant vers un développement durable.

Aussi longtemps que chacun continuera de suivre ses bas instincts, convaincu d’être soit intouchable, soit insolvable, nous continuerons à être guidés par des comportements irresponsables ponctués par ce sempiternel mot d’excuse « mangui dieggelou » qui résume à lui-seul l’incurie de notre société du « maslaa ».

Il est grand temps que les citoyens aient des actes au quotidien en accord avec leur éthique afin d’assumer ici-bas les conséquences de leurs turpitudes, ce qui ne les empêchera pas d’en répondre lors de leur jugement dernier.

Coach Barma

credo.sn@gmail.com

CNP : L'OEIL OUVERT DES EMPLOYEURS SUR LE TELETRAVAIL AU SENEGAL

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CNP : L'OEIL OUVERT DES EMPLOYEURS SUR LE TELETRAVAIL AU SENEGAL

La pandémie du Covid-19 a entraîné des bouleversements sans précédent dans l’univers professionnel, avec notamment les contraintes de distanciation, de confinement et la généralisation du télétravail.

Celui-ci s’est imposé comme une mesure d’urgence et a été appliqué dans la précipitation. Un an après, comment est-il perçu par les employeurs et les travailleurs ? Comment adapter la réglementation pour qu’il reste une solution et non un problème pour l’entreprise ? Comment l’entreprise va-t-elle devoir s’adapter aux nouvelles formes de relations professionnelles ? c’est autant de questions que le CNP a pu soumettre à ses membres et parties prenantes à travers une étude inédite présentée le 15 juillet à Dakar.

« L’œil Ouvert » - Etude du CNP sur le télétravail au Sénégal – Enjeux et perspectives : cliquez sur le cadre ci-dessous pour accéder au document en pdf.

 

CONDUCTEUR DE L’EMISSION :

00’ 18” - Introduction

01’ 52” - M. Meissa FALL - Président de la Commission Dialogue Social et Normes de Travail du CNP

06’ 27” - M. Abdoul Alpha DIA - Expert, réalisateur de l'étude du CNP,

31’ 49” - M. Mody GUIRO - Secrétaire Général de la CNTS, 

36’ 33”  - M. Dramane HAIDARA - Directeur de l'Equipe d'Appui Technique de l'OIT à Dakar,  

40’ 50”  - Mme Innocence Ntap NDIAYE - Présidente du Haut-Conseil du Dialogue Social,

43’ 22”  - M. Samba SY - Ministre du Travail, du Dialogue Social et des Relations avec les Institutions,                                         

49’ 36” - Générique

50’ 03” - Fin

cliquez dans les cadres ci-dessous pour écouter ou télécharger l’émission radio du CNP ou l’expert

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UN OUVRAGE SUR LES ENJEUX ET LES PERSPECTIVES DU TÉLÉTRAVAIL

Agence de Presse Sénégalaise - APS : Publication 16/07/2021         

Dakar, 15 juil (APS) - Le Conseil national du patronat (CNP) a présenté jeudi, une publication intitulée "L’œil ouvert des employeurs sur le télétravail au Sénégal. Enjeux et perspectives’’, a appris l’APS.
 
Cet ouvrage de 62 pages est le résultat d’enquêtes menées au sein des entreprises dans le but de connaître la perception des patrons d’entreprises du travail à distance. 
 
Il a été produit par la Commission technique "Dialogue social et normes du travail" du Conseil national du patronat (CNP) avec le concours du Bureau des activités des employeurs (ACT/EMP) de l’Organisation internationale du travail (OIT).
 
"80% des chefs d’entreprises du Sénégal ont soutenu avoir commencé le télétravail après l’avènement de la crise sanitaire liée au Covid-19", a dit Abdoul alpha Dia, Expert-Consultant ‘’RH-Organisation’’ lors de la cérémonie de présentation de la publication.
 
Dans cet ouvrage, les entrepreneurs, répondant aux questions des éditeurs, ont souligné les avantages et les inconvénients de ce type de travail qui a été imposé par la pandémie du Covid-19 apparue au Sénégal au mois de mars 2020.
 
"Le télétravail a permis aux personnes ayant des problèmes de mobilité de trouver du travail sans bouger de chez eux. Les salariés qui ont fait recours au télétravail ont vu leurs charges de travail se réduire, les horaires devenir flexibles, entraînant un gain de temps ainsi que la souplesse du travail", a fait savoir M. Dia.
 
Par contre, le travail à distance comporte aussi des inconvénients allant de la perte du lien social à la difficulté dans la gestion des performances, a indiqué l’expert-consultant.
 
"Nous avons noté des problèmes dans la supervision en continu, une augmentation des charges de télétravail et surtout la difficile conciliation entre la vie professionnelle et celle familiale. Des sentiments d’isolement et des phénomènes de dépression ont été aussi enregistrés depuis que les salariés ont entamé le télétravail au Sénégal", a-t-il relevé.
 
Pour sa part, le ministre du Travail, du Dialogue social, des Organisations professionnelles et des relations avec les Institutions, Samba Sy a soutenu que la perturbation que connaît le monde du travail est historique.
 
Citant un rapport de l’Organisation internationale du travail (OIT), il a laissé entendre qu’en 2020, 8,8% des heures de travail ont été perdues au niveau mondial par rapport au deuxième trimestre de 2019, équivalent à 255 millions d’emplois à temps plein.
 
"Les pertes en heures de travail pour 2020 ont été 4 fois plus importantes que pendant la crise financière mondiale de 2009. Pour 2021, on s’attend à une baisse de 3% de perte en heure de travail comparativement au quatrième trimestre de 2019, ce qui équivaut à 90 millions d’emplois en temps plein", a dit M. Sy.
 
Il a fait savoir que le télétravail a montré que le monde est dans un saut civilisationnel et personne ne peut se mettre à l’écart de cette dynamique. 
 
"Qu’on le veuille ou non, le mouvement du monde nous emporte et nous impose par rapport à notre législation du travail de nous ajuster et de nous adapter", a-t-il ajouté.
 
D’après le ministre, la règle des trois unités que sont : lieu, temps, et l’action, ’’socles’’ de l’exécution du contrat de travail, a été sérieusement remise en question.
 
"Avec la pandémie, lorsque les mesures de confinement sont entrées en vigueur, de nombreux travailleurs ont été invités à télétravailler si leur fonction le permettait", a-t-il déclaré.
 
La crise sanitaire a aussi révélé l’existence d’un vide juridique et règlementaire du télétravail dans les Conventions collectives et le Code du Travail au Sénégal, selon la publication.

QUAND LE COVID MET À NU LES INÉGALITÉS HOMMES-FEMMES

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PAR ADRIENNE DIOP

QUAND LE COVID MET À NU LES INÉGALITÉS HOMMES-FEMMES

EXCLUSIF SENEPLUS #SilenceDuTemps - Nos espoirs collectifs post Covid-19 devraient émaner de la prise en charge des impacts de la pandémie sur les femmes au regard du rôle fondamental qu’elles ont joué dans sa gestion

Adrienne Diop  |   Publication 08/07/2021

#SilenceDuTemps - Depuis la survenue du Covid-19, notre santé, nos politiques sanitaires, nos économies, nos méthodes de travail, nos relations familiales et amicales, en un mot, nos vies ont été bouleversées de manière profonde et irréversible. Même dans l’espoir que cette pandémie soit maîtrisée et vaincue, nous ne vivrons plus et ne travaillerons plus comme avant. Son étendue géographique, le lourd tribut en vies humaines, l’impact négatif sur les économies de nos États, les bouleversements intervenus dans le système éducatif, les conséquences désastreuses sur certains corps de métier, les répercussions sur la vie en société et la vie privée, font du Covid-19 une pandémie à nulle autre pareille. En effet, le Covid-19 s’est révélé être beaucoup plus qu’un problème sanitaire. La pandémie a non seulement mis à nu la fragilité de nos systèmes sanitaires, mais elle a également déstabilisé nos économies et modifié notre mode de vie.

Le Covid-19 a permis de mettre les projecteurs sur certaines professions essentielles dont le rôle a été fondamental dans la gestion et prise en charge des malades dans les structures sanitaires et sociales. Ces personnels sont pourtant mal rémunérés et rarement appréciés à leur juste valeur.

Ma réflexion sera principalement axée sur un aspect peu évoqué par les gouvernements et les médias durant cette crise sanitaire : son impact différencié selon les genres. En effet, cela a été l’un des enseignements les plus marquants de cette pandémie. Le Covid-19 a impacté de manière inégale les femmes et les hommes. Les femmes, par la centralité de leur rôle dans la communauté et leur position dans la structure de notre économique, ont beaucoup plus souffert que les hommes de la crise sanitaire. Le Covid-19 a mis en lumière les inégalités et les disparités socio-économiques déjà existantes entre les hommes et les femmes. Avec les plus bas revenus, vivant souvent dans des logements précaires et insalubres et ayant peu d’accès aux soins de santé adéquats, les femmes sont plus exposées aux infections.

Cette pandémie pourrait anéantir les progrès modestes mais importants, acquis en matière d’égalité des genres et des droits des femmes. À cause de la crise sanitaire, les avancées réalisées dans le cadre de l’équité sociale et de l’élimination de la pauvreté sont menacées.

Les conséquences de la crise sanitaire sont nombreuses, mais son impact sur les femmes est considérable et affecte par ricochet tous les autres secteurs. Nos espoirs collectifs post Covid-19 pourraient émaner de leur prise en charge, si l’on considère le rôle fondamental qu’elles ont joué dans sa gestion. Le Covid-19 est une opportunité pour revisiter et redéfinir nos politiques de santé en y renforçant le rôle des femmes et par de-là contribuer à la réduction des inégalités.

Bien qu’ayant été moins affecté que les autres continents si l’on considère le nombre de décès, l’Afrique a le plus souffert des conséquences du Covid-19.  Les pays africains ont payé un lourd tribut aux plans sanitaire, économique et sociétal. Le Covid-19 est venu affaiblir des structures sanitaires déjà fragiles, souffrant de politiques de santé souvent inadaptées, de manque d’infrastructures adéquatement équipées, de financement suffisant, de personnels pas toujours bien formés et souvent mal rémunérés. La pandémie a exacerbé les carences de nos systèmes sanitaires.

- Les femmes en première ligne - 

L’impact de la majorité des crises (guerre et conflits, climat, économique, chômage) est toujours plus sévère sur les femmes que sur les hommes. Le Covid-19 ne fait pas exception. En raison de leur rôle dans la société et de leur forte présence dans les structures sanitaires et sociales, elles sont sur la ligne de front des intervenants de la lutte contre la pandémie, ce qui qui font d’elles les personnes les plus exposées au Covid-19. En effet, les femmes constituent 75% des infirmières, des aides-soignantes et du personnel de soutien. Il faut ajouter à cela que 86% des assistantes sociales et des aides à domicile sont des femmes. 

Au niveau économique également, les femmes ressentent de façon plus prononcée les effets de la pandémie. Elles sont majoritaires dans les secteurs les plus affectés par crise sanitaire comme l’hôtellerie, la coiffure, le commerce et la vente, la restauration et la transformation de produits locaux. Selon les Nations unies, elles constituent également près de 60% des travailleurs qui évoluent dans le secteur informel. L’économie informelle est caractérisée par une certaine précarité, des bas salaires et moins de protection sanitaire. L’OIT informe qu’en 2020 la perte d’emploi des femmes atteint 5% contre 3,9% chez les hommes. Selon ONU Femmes, 75% des Sénégalaises évoluent dans l’économie informelle. Pour atténuer l’impact de la pandémie, le gouvernement sénégalais a soutenu des entreprises. Cependant, seules celles formellement constituées ont le plus bénéficié de cette aide, laissant un grand nombre de femmes livrées à elles-mêmes. Ces dernières sont également désavantagées par l’absence de prise en compte du travail domestique non rémunéré et l’augmentation des soins qu’elles prodiguent à domicile durant la pandémie. En 2020, les femmes représentaient 39% du monde du travail mais ont subi 54% des pertes d’emploi. À cause du Covid-19, près de 50 millions de femmes dans le monde vont basculer dans l’extrême pauvreté.

L’un des effets les plus inattendus et les plus dramatiques de la pandémie est la hausse de la violence domestique. En 2020, une femme sur cinq dans le monde a été victime de comportements violents dans son foyer. Confinement oblige, la situation des victimes de violence conjugale est aggravée par la présence permanente du partenaire en état de stress causé par le Covid-19. Il a été enregistré une hausse de 32% du nombre de plaintes relatives aux violences conjugales. À cette situation, il faut ajouter, les difficultés des services sociaux à répondre à un plus grand nombre de sollicitations dans un contexte de ralentissement économique.

La pandémie est venue nous rappeler que la santé est la chose la plus importante pour un être humain. Le Covid-19 a bouleversé nos vies par la transformation de notre organisation et méthode de travail, l’arrêt des industries, du commerce, des voyages. Nos systèmes d’enseignement ont subi des modifications majeures et la fermeture des hôtels, des restaurants, des lieux de spectacle et de divertissement nous a obligés à changer notre façon de vivre.

Pour faire face à ce défi, il est fondamental de mettre sur pied un système sanitaire performant basé sur des personnels de santé bien formés et bien rémunérés, une infrastructure de dernière génération régulièrement entretenue et des médicaments à suffisance. Ce système repose sur un financement adéquat, de solides politiques sanitaires fondées sur les besoins réels.

Si aucune action n’est prise, la pandémie va creuser l’écart de pauvreté entre les hommes et les femmes d’ici 2030. Les progrès durement acquis pourraient être anéantis par la crise sanitaire si des programmes qui intègrent la dimension genre ne sont pas adoptés. Il est donc important de placer les femmes au centre des mesures sanitaires visant à prévenir et à lutter contre les pandémies.

Le Covid-19 nous donne l’opportunité de revoir et de redéfinir nos politiques de santé à la lumière des enseignements de cette crise en renforçant la contribution des femmes. Elles devraient être impliquées au plus haut niveau lors de la formulation de ces nouvelles politiques de santé et de la prise de décision. La prise en compte de leurs préoccupations et l’identification de mécanismes est indispensable pour atténuer les impacts spécifiques sur les femmes.

- Pour un changement d'approche -

Une nouvelle approche est nécessaire. Elle passe par une volonté individuelle et politique ainsi que par l’implication du secteur privé. Il devrait y avoir des politiques de santé avant et après le Covid-19.

Le volet sanitaire doit être complété par des mesures visant réduire la vulnérabilité financière des femmes. Parmi ces mesures, le soutien des secteurs de l’économie dans lesquelles les femmes évoluent et l’accompagnement de l’économie informelle sont essentiels.

Le renforcement de la résilience économique des femmes passe également par le mentorat des petites et moyennes entreprises dirigées par les femmes, par la facilitation des prêts à taux réduits et par des mesures d’incitation fiscale.

Face à cette pandémie sans précédent, les pays africains ont la formidable opportunité de repenser leurs politiques de développement, de procéder à une redéfinition des objectifs et des moyens pour y parvenir. Nous devons réfléchir sur une politique économique post-Covid qui met l’humain au centre de ses préoccupations. Les hommes, les femmes, les jeunes, le gouvernement, les secteurs privé et informel, les ruraux et les citadins, tous doivent contribuer à l’élaboration de cette nouvelle politique qui devra être solidaire et inclusive

Cette politique passe par le renforcement de notre autonomie pour la satisfaction de certains besoins fondamentaux. Plus que jamais, la nécessité de compter sur nos propres forces pour la production de notre alimentation et pour la maîtrise de notre système sanitaire notamment les médicaments essentiels et le matériel médical. Pour y parvenir, la transformation de nos produits agricoles, halieutiques, d’élevage et miniers est une condition sine qua non. Les nombreux discours et engagements sur cette question ont été, à ce jour, très peu suivis d’actions concrètes.

Au vu des conséquences dramatiques du changement climatique sur nos économies, la protection de notre environnement est l’une des questions qui doit être inscrite au titre des priorités de cette nouvelle vision.

Le numérique s’est imposé comme incontournable durant cette pandémie. Le Covid 19 a eu des répercussions inégales sur les travailleurs et les entreprises. Certains secteurs se prêtent moins au télétravail soit par leur nature soit par manque personnel ayant une bonne maîtrise de l’outil informatique. Seules les sociétés connectées et dotées d’infrastructures et de technologies numériques ont pu continuer à opérer sans trop de dommages. La pandémie a accentué le problème de la fracture numérique. Sans une technologie numérique de pointe, les défis liés au développement et à la croissance économique ne pourront être relevés. Cet élément doit être intégré dans toute nouvelle politique de développement.

Cette pandémie a révélé l’immense potentiel de créativité des Sénégalais, prouvant à suffisance qu’elle ne demande qu’à être stimulée pour éclore. Le potentiel d’innovation des Sénégalais dans les domaines artistique, sanitaire, économique et industriel est immense. L’État a le devoir, par la création d’un environnement favorable à l’innovation et l’esprit d’entreprise, de faire révéler l’ingéniosité, le génie créateur et salvateur présent dans l’imaginaire des citoyens.

Une redéfinition de notre coopération basée un partenariat réellement « gagnant-gagnant » en misant davantage sur nos propres ressources que sur l’assistance étrangère.

L’augmentation des budgets relatifs à la santé, l’éducation, les affaires sociales, l’agriculture et l’infrastructure numérique contribuerait au renforcement de la résilience des populations.

Paradoxalement, cette tragédie que constitue le Covid-19, est une incroyable opportunité à saisir par nos gouvernants pour revisiter notre trajectoire de développement, lui donner une nouvelle direction qui permettrait l’avènement d’une société prospère, solidaire, équitable, inclusive et respectueuse de son environnement.

Adrienne Diop est une journaliste qui a fait ses gammes à la RTS et au magazine Démocratie locale entre autres. Docteure en Sciences de l’information, elle a enseigné au Cesti et à l’IFP Dakar avant d’être nommée ambassadrice du Sénégal en Malaisie entre 2015 et 2018.

SANTE PUBLIQUE : J’ACCUSE MÉDECINS ET POLITIQUES

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J’ACCUSE MÉDECINS ET POLITIQUES

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EXCLUSIF SENEPLUS - J'ai toujours pensé que ceux qui ont prêté le serment d’Hippocrate n’enverront jamais volontairement un patient à la mort. C'est pourtant ce qui est arrivé avec MB qui pouvait être sauvée si les médecins s’étaient bien occupés d'elle

Serigne Saliou Guèye de SenePlus | Publication 28/07/2021

Nous sommes le vendredi 16 juillet 2021 vers 15 h, la dame MB, habitant à Ouest Foire, ressent des douleurs au niveau de la poitrine. Direction Samu municipale où on fait savoir à ses accompagnantes qu’elle a les poumons bouchés. Elle souffre d’une détresse respiratoire selon le diagnostic établi. Souffrait-elle d’une embolie pulmonaire ? Tout laissait croire après les déclarations de la patiente qu’elle souffrait d’un infarctus du myocarde ou d’une angine de la poitrine. Cela nécessite une hospitalisation d’urgence afin de pallier la déficience d’oxygène. Pourtant, pour traiter cette détresse respiratoire, il lui faut un apport supplémentaire d'oxygène inhalé par l’utilisation des lunettes à oxygène, d’un système d'oxygénothérapie nasale à haut débit, ou d’un masque naso-buccal apportant de l'air sous pression au patient. Mais rien de tout cela. Malgré cette détresse respiratoire, le médecin trouvé sur place lui a administré une perfusion qu’elle ne supportait pas. Nonobstant les interpellations de la patiente qui déclare insupporter la perfusion, on lui administre deux bouteilles avant de la laisser partir avec sa douleur qui s’est intensifiée du fait des bouteilles de liquides insupportables.

Le lendemain samedi 17 juillet, MB se plaint à nouveau de la même douleur vers 19h. On constate le début d’une hémiplégie au côté gauche assortie d’une déformation de la bouche. Ce sont là les signes d’un AVC.

Direction toujours Samu qui, cette fois-ci, se rendant compte de la gravité du mal qui consume la stoïque MB, indique à ses accompagnants de l’acheminer dare-dare à l’hôpital Fann sans aucun soin préalable. C’est en ce moment, informé de la douleur de MB, que je me dirige vers Fann. Au Service d’Accueil des Urgences (SAU) de Fann, la dame en souffrance est consultée après plusieurs minutes d’attente. On lui demande de faire un scanner thoracique. Puisqu’elle est en crise convulsive du fait de sa respiration quasi-bloquée, il lui est impossible de faire le scanner. Faut-il l’endormir pour la passer au scanner faut-il la laisser avec ses convulsions ? Les médecins sont divisés sur la question. Finalement, elle a été perfusée dans les couloirs du SAU avec une dose de valium. Mais l’intensité de la douleur à la poitrine ponctuée par des convulsions répétitives empêche la patiente de dormir en dépit de la dose de valium. L’espace du SAU est bondé de patients perfusés qui n’ont pas de place dans les salles d’hospitalisation. La situation est intenable et les images insoutenables. Les malades se tordent de douleur devant l’impuissance de leurs accompagnants et les médecins en sous-nombre sont débordés. En dépit de leur nombre insuffisant, ils se transbahutent d’un malade à un autre pour les soulager du mal qui les consume. On nous dit que plusieurs de ces patients souffrent de la grippe. Mais cette grippe qui ravage les familles n’est-elle pas une manifestation du Covid-19 version Delta ? Le docteur Mamadou Mansour Diouf, médecin anesthésiste réanimateur au CHU de Bordeaux, a confirmé que cette grippe en réalité est une manifestation du Covid.

Revenant à ma patiente, je l’ai quittée vers une heure du matin, la laissant avec mon neveu qui, depuis la veille, ne la quitte pas d’une semelle. Le dimanche 19 juillet vers 4h du matin, je m’enquiers de l’état de santé de MB. On vient de lui ingérer une forte dose de Bialminal (six comprimés de 100 mg) connu pour ses propriétés anticonvulsivantes et sédatives-hypnotiques et un demi-comprimé de Rivotril pour l’endormir. Pourtant, il est indiqué que Bialminal ne doit pas être administré aux patients présentant une dépression respiratoire sévère.

Le site https://medikamio.com/pt-pt/medicamentos/bialminal/pil indique ceci sur le Bialminal : « En tant que sédatif : chez l'adulte, la dose usuelle est de 30 à 120 mg par jour, à répartir en 2 ou 3 prises, mais il n'y a pas d'intérêt à diviser la dose journalière. Chez les patients âgés et affaiblis, il peut être nécessaire d'utiliser des doses plus faibles. Chez l'enfant, la dose habituelle est de 2 mg/kg de poids corporel ou de 60 mg/m2 de surface corporelle, 3 fois par jour. Lorsqu'il est utilisé chez l'enfant avant la chirurgie, la dose habituelle est de 1 à 3 mg/kg de poids corporel. En tant qu'hypnotique : chez l'adulte, la dose hypnotique est de 100 à 200 mg. La dose maximale de Bialminal ne doit pas dépasser 600 mg sur une période de 24 heures. Une surdose ou une intoxication peut provoquer une dépression du système nerveux central (SNC), allant du sommeil au coma profond. Dans les intoxications graves, les complications pulmonaires et l'insuffisance rénale peuvent entraîner la mort. »

Pourtant, c’est une patiente âgée de 45 ans affaiblie souffrant depuis plus de 24 heures de dépression respiratoire à qui on a fait ingérer 600 mg de Bialminal et la moitié d’un Rivotril pour l’endormir. L’overdose est atteinte et malheureusement, MB est plongée dans la voie de la mort. Le dimanche 18 juillet vers 9h, on notifie à mon neveu l’accompagnant de faire le scanner dans son état de veille. Il fallait justifier les 90 000 francs payés la veille pour faire le scanner. Cela fait, aucune maladie n’a été notifiée par les médecins à mon neveu sinon que la patiente a un besoin d’oxygène parce que l’hôpital Fann n’en a pas. Ce qui veut dire qu’il faut sortir rapidement la patiente cliniquement morte de cet hôpital avant qu’on ne le lui impute la responsabilité.

Malgré l’interpellation de mon neveu sur l’état d’inertie de la patiente, on lui fait savoir qu’elle dort et qu’elle ne tarderait pas à se réveiller après l’effet des médicaments combinés. Vers midi, mon neveu me fait savoir qu’il se dirige vers la clinique Casahous à la recherche désespérée d’oxygène parce qu’il n’y en a point dans l’hôpital Fann d’après les médecins. Immédiatement, j’appelle à la Clinique Médic’Kane pour une prise en charge immédiate, mais c’est saturé. SOS Médecins : on me fait savoir que la structure réanime, mais n’hospitalise pas. Suma injoignable. Je tente avec Casahous. Même réponse : clinique archi-pleine. Mon neveu y est déjà, mais tout en étant convaincu que la patiente n’est plus de ce monde. Et c’est vers 12h30 qu’il m’appelle pour me dire que MB a tiré sa révérence. Ce que je refuse. Je refuse de penser que cette dame que j’ai connue pétillante de vie quitte ce monde de cette façon injuste. Et je lui demande de requérir l’avis d’un médecin. Hélas, ce dernier confirme ce que je ne veux pas entendre. C’est en ce moment que je réalise toute l’injustice dont ma parente a été victime du début de son mal jusqu’à sa mort.

J’ai l’habitude d’entendre des gens se plaindre de la mort d’un proche pour négligence médicale, mais je me dis toujours et à tort qu’il y a de l’exagération dans leurs plaintes parce que, pour moi, ceux qui ont prêté le serment d’Hippocrate n’enverront jamais volontairement un patient à la mort. Pourtant c’est ce qui est arrivé avec MB qui pouvait bien être sauvée si les médecins s’étaient bien occupés d'elle depuis le Samu jusqu’à Fann. Vers 13h30, MB est retournée à Fann, mais cette fois-là pour être déposée à la morgue. Aucune mention sur le certificat de décès délivré par le médecin n’indique la ou les cause(s) du décès de MB. Et c’est le lendemain lundi 19 juillet que nous sommes passés à Fann récupérer dans la colère et la tristesse le corps de notre chère MB pour les besoins de l’inhumation à Yoff et l’organisation des obsèques.  

Ainsi, j’accuse les services de la santé du Samu et du SAU de Fann d’être responsables de la mort de MB même si je réalise que les conditions dans lesquelles ces médecins en sous-effectifs travaillent sont insupportables. Mais la vie précieuse et Hippocrate excluent toute discrimination ou favoristime dans le traitement des patients.

J’accuse les services de la santé du Samu et du SAU de Fann de n’avoir pas livré à ce jour les véritables causes de la mort de la patiente MB.

J’accuse les services de la santé du Samu et du SAU de Fann d’avoir prodigué des soins négligents à MB qui ont fini par un empoisonnement létal.

J’accuse le président de la République et le ministre de la Santé de n’avoir pas suffisamment doté nos structures de santé de lits et d’oxygène en quantité suffisante alors les citoyens s’acquittent de leurs impôts pour bénéficier de soins de qualité. 

J’accuse le ministre le président de la République et le ministre de la Santé de condamner à mort tous les patients qui n’ont pas de relations avec des personnalités influentes pour bénéficier de certains passe-droits dans les structures de santé.

Pour finir, j’invite les médecins du SAU de Fann et du Samu à qui je voue un respect profond à revisiter ces passages du serment d’Hippocrate :

« Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions.

Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. »

sgueye@seneplus.com