LES TRANSFERTS D'ARGENT

Transfert d’argent domestique : Plongée dans un business qui explose…

 

Avec 94% de la population non bancarisée, le secteur du transfert d’argent est comme une poule aux œufs d’or. Un marché en forte croissance qui suscite beaucoup de convoitises…

Ces dernières années, le secteur du transfert d’argent s’est considérablement développé. Aux doyens Western Union, Money Gram, Ria (qui opèrent chacun dans +150 pays), sont venus se greffer des novices comme Wari, Orange Money et récemment Joni-Joni qui se disputent les parts de marché sur les transferts domestiques et gagnent de plus en plus de places, voire même bousculent la hiérarchie… Cette montée en puissance s’explique par l’attachement progressif de nos compatriotes aux services de transfert d’argent.

Une enquête réalisée en décembre 2012 par le Cabinet Afrique Communication a révélé que Wari et Western Union sont les deux principaux services les plus connus. Money Gram arrivait en 3ème position mais il faut désormais tenir compte de Joni Joni qui est vient d’arriver sur le marché à travers un lancement en fanfare, grâce à une campagne de communication tentaculaire à travers les supports média et hors-média de D Media (télé Sen Tv, radio Zik Fm, réseau d’affichage de Dak’cor…) et en sponsorisant aussi de grands combats de lutte.

L’étude a confirmé que les Sénégalais, pris dans leur ensemble ou regroupés dans les différentes localités, sont des utilisateurs assidus des services de transfert d’argent. Elle montre que le cash à cash est le moyen de transfert le plus utilisé par ceux qui envoient ou reçoivent de l’argent, avec un taux de citation de plus de 95%. Le cash à cash est suivi du transfert mobile qui est en train de se frayer un chemin parmi les moyens de transfert d’argent.

Outre des envois d’argent de l’intérieur du Sénégal, on observe des transferts importants provenant de la France, de l’Italie, de l’Espagne et des Etats-Unis. En Afrique, des pays tels que le Gabon, le Mali et le Maroc constituent aussi une source appréciable d’envoi d’argent. L’enquête sur l’évaluation de la qualité des services de transfert d’argent a été réalisée par des équipes du cabinet Afrique Communication qui ont sillonné les localités de Dakar, Thiès, Saint-Louis, Louga, Matam, Touba, Kaolack et Mbour.

 

La concurrence par les prix

S’ils semblent tous prôner la rapidité, la proximité et la fiabilité, force est de reconnaitre que les services de transfert d’argent sont aussi diversifiés, de par leurs coûts. Par exemple, pour Western Union, il faut débourser une commission de 56 320 Fcfa pour envoyer un million Fcfa vers la France, tandis qu’avec Money Gram, pour la même somme et la même destination, il faut payer 45 732 Fcfa…

La concurrence, devenue de plus en vive sur le marché du transfert d’argent, a engendré une forte pression sur les prix. C’est d’abord Money Express qui, le premier, s’est engouffré dans cette brèche, en menant la vie dure à Western Union, jusque dans les pays d’émission, en Europe surtout, chez nos parents modou-modou, en cassant les prix et en jouant sur le côté nationaliste de leur slogan, «L’Afrique a son transfert d’argent». Ensuite, Ria a suivi la même stratégie du fractionnement du prix, soit le même service rendu à moindre coût.

Aujourd’hui, c’est une guerre sans concessions entre opérateurs qui pensent, tous, que c’est l’arme fatale pour se faire une place au soleil. Jugez-en vous-même !

Si la puissance des multinationales du transfert d’argent sur le marché mondial est jusque-là incontestée, le constat est qu’aujourd’hui, sur le marché local, les novices sont en train de tout chambouler. A la tête desquels, il y a Wari. Arrivé sur le marché, il y a juste 2 ans, la société-mère Cellular Systems International (CSI) a développé une plateforme centralisée de services interactifs, le transfert d’argent en particulier, dont l’expansion continue d’impressionner. Selon des informations disponibles sur son site, on fait état d’une progression moyenne des transactions Wari à hauteur de 30% par mois. Une progression phénoménale qui renseigne sur la popularité de ce service qui a défié tous les pronostics. Non seulement au Sénégal mais aussi dans plus de 25 pays africains de la sous-région et jusqu’en Afrique de l’est anglophone (Kenya, Tanzanie, Ouganda…).

«Au Sénégal, Wari a eu beaucoup de succès et dans une journée normale, environ 65 000 transactions sont effectuées par les 2 000 agents de Wari. C’est grâce à sa compréhension des besoins spécifiques du marché que Wari a réussi à créer un modèle adapté aux besoins des clients… Globalement, Wari réalise environ 1,5 millions de transactions par jour, soit 40 millions par mois…».

Après ce succès fou au Sénégal, Kabirou Mbodj et son staff se sont attaqués aux autres pays en signant des partenariats avec des organisations (Poste, institutions de micro-finance, ONG, stations d’essence, commerces,…) qui comprenaient les besoins locaux mais n’avaient pas les capacités techniques de les satisfaire.

Cependant, ces chiffres avancés par Wari laissent un peu perplexes. Une hausse de 30% à 35% par mois équivaut à un doublement de l’activité (100%), tous les trimestres. Ce qui semble «énorme» pour ce business, aussi florissant soit-il…

Les cibles se mélangent… des voix s’élèvent

Si les premiers services de transfert d’argent mobile avec codes et mots de passe étaient plus destinés aux alphabétisés en français (une minorité), les novices ont sans doute compris qu’il faut plutôt cibler le grand public et le secteur informel qui sont les plus gros usagers de ces services de transfert d’argent.

D’ailleurs, beaucoup d’entre eux ont commencé à utiliser ces services avec l’arrivée des Wari et autres Joni-Joni. «J’ai une fois essayé avec un service dans lequel on donne un mot de passe, une question/ réponse, mais c’était compliqué pour le destinataire qui n’est pas instruit. Pour moi qui gère 4 boucheries, je dois récupérer les recettes tous les deux jours. C’est pourquoi j’ai acheté un scooter, mais depuis que le transfert a été simplifié, je l’utilise de plus en plus», explique Pape Cheikh Mbengue, boucher établi aux Hlm Hann Maristes.

S’ils semblent intéresser beaucoup plus les analphabètes, les nouveaux types de transfert, de par leur simplicité, attirent de plus en plus les plus instruits. C’est du moins ce que semble expliquer M. Seydi, instituteur de son état. «J’utilisais les anciens systèmes de transfert, mais avec leurs points qui ne sont pas aussi nombreux, les mots de passe et autres, c’est plus simple pour moi de passer par les nouveaux services. Dés l’envoi, je suis tranquille…», dit-il.

Mais cette montée en puissance des services de transfert d’argent mobile n’est pas sans conséquences pour les circuits traditionnels. Dans une interview à Wal Fadjri, Pape Momar Diop, Secrétaire général du Syndicat national de la Poste, tirait déjà la sonnette d’alarme. «Toutes les entreprises s’activent maintenant dans ce secteur. Même dans les garages de transport, les gens font du transfert d’argent. En effet, on donne de l’argent à des transporteurs se rendant dans les pays limitrophes. Même au niveau continental, nous avons constaté cette concurrence informelle. Nous reconnaissons que nous avons un régime libéral, mais cela ne doit pas faire oublier que la Poste a une mission de service public, des acquis et des emplois à préserver. Même des entreprises qui n’avaient pas vocation à faire du transfert d’argent, s’y activent. C’est le cas de la société de téléphonie, Sonatel», avertissait-t-il. Non sans préciser que la société nationale La Poste a des emplois à sauvegarder. «C’est la raison pour laquelle nous nous battons contre cette concurrence déloyale. Et nous demandons à l’Etat de voter des lois pour protéger la Poste contre cette concurrence déloyale formelle et informelle qui menace la survie de notre outil de travail. Cela a des répercussions sur notre chiffre d’affaires. Par exemple, nous avons des acquis qui sont liés au chiffre d’affaires. Ce sont les indemnités de croissance et de motivation. Cela a été inscrit dans les accords, mais depuis que la concurrence s’est fortement installée, nous n’avons plus perçu nos indemnités. Parce que le chiffre d’affaires de la Poste s’est fortement dégradé à cause de cette concurrence. C’est pourquoi, nous demandons l’assainissement du secteur du transfert d’argent afin d’assurer la sécurité des opérations et de protéger La Poste contre toute concurrence déloyale…», déclare-t-il.

Le transfert via le mobile, jugé restrictif…

Avec le développement du mobile au Sénégal, certains acteurs ont estimé que tout le potentiel n’était pas exploité. Ainsi, Sonatel a lancé, en 2010, le premier service de transfert d’argent, dénommé Orange Money. Un service qui permet à partir d’un compte créé sur un mobile Orange, de déposer de l’argent, de le transférer, de consulter son compte, de payer des factures, de rembourser une échéance de prêt micro-crédit, d’acheter du crédit Orange, de retirer de l’argent partout au Sénégal…

Donc, Orange Money est le fruit d’un partenariat avec la Bicis qui est chargée de l’émission de la monnaie électronique, de la conformité et de la garantie de bonne fin du service.

Mais ce système, de par sa configuration pas très simple, semble exclure nombre de consommateurs. D’abord, il faut être abonné à Orange, puis souscrire à Orange Money. Sans parler du processus d’envoi qui semble exclure d’office les analphabètes. «C’est très sûr parce que la boite, qui le porte, Sonatel, est connu pour être fiable, mais ce service ne semble pas être fait pour les analphabètes», estime M. Seydi qui reconnait que la satisfaction est assurée sur les services offerts, des promotions sur les crédits téléphoniques au paiement des factures.

Avec des points de vente estimés à environ 2 000 agents, Wari est le service le plus disponible. Cependant, ces derniers temps, ce service a été souvent confronté à des problèmes de réseau technique et d’accessibilité (crise de croissance ?), même si des correctifs sont promis par sa Direction. «Il faudrait que l’Etat contrôle davantage ce secteur. Il ne sert à rien de multiplier les points alors que le réseau ne le supporte pas l’intensification du trafic. Souvent, on ne sent pas la présence d’un régulateur derrière» déplore Mamadou Mbengue, professeur.

Les mêmes errements sont notés dans le réseau d’Orange Money. En effet, les jours de promotion, le réseau est quasi-inutilisable tellement il est saturé…

Un potentiel largement inexploité

S’il est vrai que la libéralisation du secteur du transfert d’argent a favorisé la concurrence qui a légèrement impacté sur les coûts, il n’en demeure pas moins que les prix sont jugés encore élevés, comparés aux autres pays du Maghreb et de l’Amérique Latine.

Selon Mme Oulimata Diop, Directeur de la Monnaie et du Crédit (DMC), qui se prononçait à l’issue d’un atelier de restitution des résultats d’une étude portant sur la réduction du coût des transferts d’argent des migrants africains, des mesures ont été prises sur le cadre règlementaire en mettant fin, par exemple, aux contrats d’exclusivité qui étaient pratiqués. Il faut dire que la suppression de ces contrats d’exclusivité est le fruit d’un lobbying intensif, mené alors par la direction de Money Express auprès notamment du ministre des Finances de l’époque, Abdoulaye Diop, qui avait été très réceptif à leurs arguments.

D’après Mme Diop, «au Sénégal, on estime que des ressources de plus de 600 milliards Fcfa sont envoyées annuellement par les migrants. Tout effort de nature à réduire le coût des transferts pourrait impacter positivement sur le volume et encourager la Diaspora à envoyer des montants plus importants encore. Cela pourrait orienter les transferts vers les structures formelles en lieu et place des circuits informels où passe une grande partie des transferts…».

En effet, avec la baisse continue des coûts, le marché informel tend à perdre du terrain à cause également des risques d’insécurité, inhérents à son caractère… informel.

D’autre part, selon un rapport de la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif), le transfert d’argent peut être une voie de blanchiment d’argent sale au même titre que l’immobilier ou le marché des voitures d’occasion… Aussi, les opérateurs informels sont très souvent des commerçants qui offrent leurs services à des prix relativement bas. Là où les sociétés classiques peuvent demander jusqu’à 10% du montant envoyé, le circuit informel demande juste entre 3 et 5% du montant, voire même un coût nul si les opérations ont lieu dans le cadre familial.

Mais l’élargissement des sociétés de transfert d’argent se heurte aussi aux règles contraignantes de l’Uemoa, ce business est quand même soumis à un ensemble de dispositions légales qui limite les opérateurs habilités à réaliser des opérations avec l’étranger. Cette situation restreint notamment les services de transfert d’argent dans les zones rurales et provoque un accroissement dans ces régions de l’usage des canaux informels.

 

Oumar Fédior /// Journaliste Reporter au Magazine RÉUSSIR

 

 

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Marché de transfert d’argent au Sénégal : L’hégémonie des banques classiques mise en péril

Dossier publié par Finances  le 6 November 2015

 

Source :http://www.ecodafrik.com/marche-de-transfert-dargent-au-senegal-lhegemonie-des-banques-classiques-mise/

Marche de transfert d’argent au Sénégal : L’hégémonie des banques classiques mise à rude épreuve

Les banques classiques et les institutions de micro-finances ont été, durant plusieurs années, les seuls acteurs du marché des transferts d’argent au Sénégal à travers des structures financières telles que Western union, Money gram, Money express. Mais, aujourd’hui, ces dernières semblent bousculées par d’autres concurrents qui grignotent les parts de marchés comme Wari, Joni-Joni, entre autres. Du côté des usagers, on se réjouit de la proximité et de la rapidité des services de ces structures. Toutefois, ces clients déplorent la cherté des frais de transfert et souhaitent leur baisse.

Difficile de circuler dans les rues de la capitale sans tomber sur une boutique où on offre de multiples services notamment le transfert d’argent. Ces cantines pullulent comme des champignons. La moindre surface d’un angle d’une rue est transformée en un centre de services financiers. De véritables places financières décentralisées, devrait-on dire. Au rond-point Jet d’eau, à une trentaine de mètres, une affiche publicitaire lumineuse indique la direction d’une bâtisse toute neuve peinte en blanc-gris. A l’intérieur, quelques clients prennent place sur les chaises rangées de part et d’autre. Au fond, Marie Sylla, une belle nymphe au joli teint clair, le regard attirant, le sourire accueillant, se concentre sur son ordinateur. Elle est au service de ses hôtes. L’impatience se lit sur les visages de certains d’entre eux. Mais le respect de l’ordre d’arrivée s’érige en règle.
Moustapha Kaba, 40 ans, est agent administratif. C’est la fin du mois. Il doit envoyer les frais de la dépense quotidienne au village. Et le moyen le plus rapide, selon lui, reste les structures de transferts d’argent. C’est pourquoi il s’est pointé dès les premières heures de la matinée pour s’acquitter de cette tâche avant de rejoindre le bureau. « Auparavant, je partais à l’ancienne gare routière de Pompiers pour envoyer de l’argent à mes parents. Maintenant qu’il existe d’autres mécanismes qui permettent de faire le même travail beaucoup plus rapide, je ne peux que m’en réjouir », se félicite-t-il. Même sentiment de satisfaction chez un autre client Lamine Kairé, qui relève l’efficacité et la discrétion du service. Il vient d’envoyer un montant de 80.000 FCfa à son grand frère habitant à Bambèye pour les besoins de la finition de sa maison. Toutefois, il déplore les frais jugés « exorbitants » par rapport à la somme envoyée. « Sur le montant envoyé, j’ai payé 4.000 FCfa. Cela est trop cher », dénonce-t-il, invitant les responsables des opérateurs de transferts à revoir leur tarification d’envoi. A son avis, avec la multiplication des structures de transfert d’argent, on pourrait avoir des coûts beaucoup moins chers. La concurrence, argumente-t-il, doit profiter aux clients.

La gérante, Mlle Sylla, quant à elle, tire bien son épingle du jeu vu le nombre important de transactions effectuées par jour. Ce qui permet à sa structure de gagner des commissions sur les envois, les retraits et le paiement d’autres services comme les factures dans la journée. Cependant, elle reste aphone sur son chiffre d’affaires malgré notre insistance. Moussa est propriétaire d’une quincaillerie établie au Front de terre, non loin de la gendarmerie. En plus de ses activités de commerçant, il a aménagé un petit cabinet au coin de sa boutique pour faire des services de transferts d’argent. Presque toutes les structures sont présentes dans ses offres, Orange money, Wari, Joni-Joni, Yobanté cash… Ismaël est aux manettes. A l’aide de téléphone couplé d’une minuscule imprimerie laser et d’un ordinateur portable, de l’autre côté, il réalise ses transactions. Assis sous un ventilateur pendu au plafond, le bonhomme très sollicité, est accueillant. Une de ses clientes, Fama Gaye vient tout juste de payer sa facture d’électricité moyennant des frais estimés à 500FCfa. « J’allais passer des heures à patienter dans les rangs devant les agences Senelec pour m’acquitter de mes factures. Ce qui fait que je perdais beaucoup de temps », explique la dame, très affaiblie par la canicule. Une autre fille voilée, détentrice d’un compte orange money vient, elle, effectuer un retrait pour régler ses besoins personnels. Comme d’autres clients, elle dénonce la facturation chère des montants transférés. En raison d’un envoi de 5.000 FCfa, il faut payer 400 FCfa et 700 pour 10.000 FCfa. L’arrivée de Wari, Joni Joni… a donné une nouvelle configuration au marché de transfert d’argent qui été longtemps sous le contrôle des banques classiques par le biais de Western Union, Money Gram, entre autres. Aujourd’hui, les usagers semblent sortir des contraintes bancaires pour pouvoir effectuer un certain nombre de services financiers tels que le paiement mobile, le transfert de fonds, l’épargne etc.

PAIEMENT MOBILE OU MOBILE BANKING : La revanche des exclus du système bancaire
La révolution des Tic n’a pas épargné l’univers des finances avec l’utilisation du téléphone portable dans les services financiers. Grâce à cet outil de communication, l’usager parvient également à ouvrir son propre compte, effectuer des transactions, faire des épargnes et régler ses factures. Autant d’opportunités qui constituent, selon certains analystes, une réponse au problème de la bancarisation que rencontre une bonne partie de la population.
Face à la complexité des procédures administratives bancaires, à l’ignorance par bon nombre de la population du fonctionnement du système des banques, à la flambée usuraire des taux d’intérêts pratiqués par les institutions de crédit, l’avènement du paiement mobile ou « mobile banking » semble être une alternative pour combler ce gap. Aujourd’hui, la plupart des personnes qui n’ont pas la possibilité d’accéder aux banques, pour diverses raisons, se contentent à l’ouverture de compte à travers les opérateurs de téléphonie. Pour Abdoul Karim Sow, directeur du Centre de traitement informatisé du Sénégal (Ctisn), une structure s’activant dans les Services financiers décentralisés (Sfd), le « mobile banking » est un marché qui reste très dynamique avec de plus en plus d’acteurs qui essaient d’offrir encore plus de services en misant sur la convergence de plusieurs supports notamment la monétique.
Il estime que l’avènement de la carte Joni Joni liée à la plateforme de transfert est un exemple intéressant à suivre. C’est un marché, dit-il, qui reste très dynamique avec des possibilités d’innovations. Celles-ci, souligne M. Sow, doivent aller dans le sens de dépasser simplement le transfert d’argent. « Il est possible aujourd’hui d’améliorer les plateformes pour faciliter l’ensemble de nos transactions quotidiennes avec les paiements mobiles par exemple payer le taxi, le bus le boutiquier du coin etc. », préconise-t-il. Mais pour cela, à son avis, il faudra une politique audacieuse des autorités tendant à favoriser l’utilisation de tels services avec des mesures incitatives. Selon le patron de Ctisn, le paiement mobile réduit la circulation du cash et sécurise les personnes qui voyagent dans des zones de conflits. En plus, il réduit « pas mal » le coût de transaction sur les microcrédits surtout en zone rurale où certaines populations doivent payer des coûts de déplacement importants pour payer un microcrédit. En réalité, le paiement mobile devra faciliter la vie des populations en permettant le paiement des services des bases (eau, électricité etc.) en toute sécurité, l’accès à l’information et d’autres services relatif au M-commerce (Mobile commerce).
Pour sa part, Dr Abdoul Salam Fall, sociologue, coordinateur du Laboratoire de recherche sur les transformations économiques et sociales (Lartes) à l’Ifan, relève que face à l’explosion du nombre d’abonnés en mobile, la téléphonie mobile est devenue un moyen d’initiation et d’exécution de transactions financières en ligne. Il soutient que le paiement mobile a créé une zone de convergence entre ces deux secteurs. Sa cible, indique-t-il, est la population non bancarisée qui demeure importante au Sénégal si l’on tient compte de la proportion d’analphabètes. Pour M. Fall, l’émergence des solutions « orientées mobile » offertes par les Smartphones dans le marché des télécommunications réduit la présence physique dans les banques.
En effet, ces solutions, de par leur simplicité, se substituent à celles proposées par le système bancaire (inutile de renseigner un numéro de carte bancaire au moment de l’achat sur son mobile). L’opérateur devient le maillon le plus important de toute la chaîne de valeur, maîtrisant la création et la gestion du compte au paiement. Comparé à l’acte bancaire, le paiement par l’opérateur présente de nombreux avantages dont la fluidité, la simplicité et le coût des transactions pour le client.
Pour un cadre juridique incitatif
Pour le directeur du Lartes, Dr Abdou Salam Fall, le pullulement des services de mobile cash au Sénégal s’est développé « sans préavis », sans qu’il ait pu se préparer en amont un cadre réglementaire. A l’heure actuelle, constate-t-il, « le Sénégal ne dispose pas d’un cadre légal et réglementaire favorable » pour l’activité de transfert de fonds par téléphonie mobile. Or, souligne Abdoul Salam Fall, ce sont les intérêts des consommateurs et la durabilité de tels produits qui sont en jeu. De plus, indépendamment de la protection du consommateur, ce cadre légal permettrait de superviser les systèmes de paiement, les contrats électroniques y afférents, les potentielles activités de blanchiment d’argent et les technologies de l’information et de la communication. M. Sall estime que dans notre pays, l’absence d’une réglementation appropriée pour ce service « novateur » qu’est le mobile cash est vécue sans grande difficulté par les consommateurs qui transcendent les frontières.
M. Sow ne semble pas partager cet avis car, selon lui, la réglementation sur les moyens de paiement existe avec comme principales motivations : servir de siège légal aux systèmes automatisés de paiement, créer un environnement juridique adapté à la mise en place des conventions de place devant sous-tendre le fonctionnement des différents systèmes, affirmer la conformité aux normes internationales des règles mises en place dans le cadre du nouveau système de paiement. S’y ajoute la facilitation de la mise en œuvre des mesures de promotion de la bancarisation et de l’utilisation des moyens scripturaux et les aménagements à la loi uniformes sur les instruments de paiement. Pour favoriser l’accès de ces services liés au paiement mobile, Abdou Salam Fall juge nécessaire de prendre en compte l’univers culturel des communautés dans la définition des politiques, former et éduquer les populations à l’appropriation des services de paiement mobile. Dans les pays où l’économie est basée sur la liquidité, le paiement mobile constitue un élément essentiel pour faire face à l’équation de la bancarisation dont le taux peine toujours à dépasser les 20% malgré la floraison des banques et des institutions de microfinance.

L’adoption du paiement mobile fortement tributaire du niveau d’instruction, selon une étude du Cres
L’étude intitulée « Inclusion financière à travers le mobile-banking dans la niche des ménages à faible revenu », réalisée par Yaya Ky, François Seck Fall et Ousmane Birba, chercheurs au Cres, établit une corrélation entre le niveau d’instruction et la possession du m-banking. En réalité, ceux qui ont un certain niveau d’études utilisent plus facilement ces outils. Selon les auteurs, les personnes qui savent lire et écrire possèdent plus cette technologie que celles qui sont analphabètes ou qui ont un faible niveau d’instruction. En outre, l’enquête du Cres révèle que les membres d’une tontine, les propriétaires de micro-entreprise ont plus intégré cette solution technologique dans la gestion de leurs affaires.
En dépit de ces opportunités, le taux de pénétration du m-banking reste relativement faible dans les pays comme le Sénégal où le rythme de diffusion de la téléphonie mobile est pourtant passé de 10 % en 2005 à 77 % en 2011. Il est donc important, d’après les chercheurs du Cres, d’explorer les pistes devant conduire à une utilisation plus accrue des services financiers via la téléphonie mobile. L’étude, qui tente d’apporter des éclairages sur les facteurs sociaux et économiques de l’intégration du mobile-Banking dans la banlieue dakaroise aux différentes étapes de son adoption, note également que l’âge a tout son poids sur la méconnaissance du m-banking chez les sujets interrogés. En effet, la probabilité pour les personnes qui ont 45 ans et plus de connaître cette technologie est faible au premier stade du processus d’adoption à savoir la connaissance. Par contre, les autres caractéristiques des personnes enquêtées ne sont pas si déterminantes à cette étape, mentionne le document du Cres. Ajoutant que la nouvelle influence liée au salaire peut s’expliquer par le faible coût du recours au m-banking. L’utilisation de cette technologie est également tributaire du niveau du revenu dans certains cas. Il est apparu que le revenu modeste peut aussi pousser des individus à ne pas intégrer le m-banking dans leur mode vie en estimant que leur marge de manœuvre en matière d’épargne est marginale.

SOULEYMANE CISSOKHO, ECONOMISTE, FINANCIER : « Les prestataires n’ont pas suffisamment développé les énormes potentialités que présentent les services de paiement mobile »
De l’avis de Soulymane Cissokho, économiste, financier, spécialiste en suivi et évaluation, les nombreuses opportunités qu’offre le paiement mobile n’ont pas encore été exploitées dans notre pays. Il déplore le manque de transparence dans la tarification car, soutient-il, les coûts liés aux prestations restent très élevés par rapport à la qualité du service fourni.

Quelles appréciations faites-vous de l’avènement du paiement mobile au Sénégal et la problématique de l’inclusion financière ?
Je constate que malgré un fort taux de pénétration du téléphone mobile, favorisé par la concurrence du marché, le paiement en espèces continue de dominer toujours dans les transactions, ce qui explique en partie le faible taux de bancarisation de la population. En plus, je remarque que ce fort taux de pénétration du téléphone mobile ne parvient pas à servir comme un moyen d’inclusion financière pour faciliter la bancarisation de la majorité de la population active à travers le développement des services de banques à distance par le biais de la téléphonie mobile, particulièrement dans les zones rurales. Enfin, il faut noter que ce faible taux de bancarisation de la population ne facilite pas l’épargne car ce dernier est l’un des produits financiers le plus important, parce qu’il il permet de constituer une réserve pour effectuer des transactions courantes et également de faire face aux dépenses d’imprévus, ou de constituer une garantie en cas de nécessité de contracter un emprunt avec une institution financière. Ainsi, on peut dire que l’avènement du paiement mobile a connu un boom extraordinaire au Sénégal sous une approche de consommateurs et non clientéliste. Car l’offre des produits et services obéit plus avec une approche ciblée de la clientèle. Et je trouve que les prestataires n’ont pas suffisamment développé les énormes potentialités que présentent ces services de paiement mobile.
Cependant il faut souligner que quelques prestataires sont souvent bien positionnés pour vendre un produit d’envoi de fonds de qualité, qui réponde spécifiquement aux besoins de leur base de clientèle traditionnelle. Par ailleurs, un certain nombre de facteurs essentiels doivent être réunis pour garantir le succès dans le domaine des transferts d’argent par le paiement mobile. Ainsi, il faut souligner que la qualité des produits liés aux transferts d’argent est caractérisée par leur rapidité, leur fiabilité, leur accessibilité et par la tarification correcte, transparente et également facile d’utilisation. Sous ce rapport, il doit prendre en compte les besoins essentiels des clients, expéditeurs comme destinataires. C’est pourquoi le processus de développement des produits de transferts d’argent doit être rigoureusement soumis à la logique des « 8 P » qui sont une méthode d’évaluation de la conception des produits à offrir comme suit :

Public : C’est-à-dire le ciblage du groupe doit être homogène, identifiable, accessible et de taille suffisante, en cherchant quelle est la proposition de valeur pour ce groupe ? Puis de savoir s’il y a un décalage entre l’offre actuelle et la demande du marché cible ?
Produit : Il s’agit dans ce cadre de voir toutes les caractéristiques et attributs du produit, ses avantages, son appellation, et également de s’assurer les avantages qu’il procure aussi bien pour les clients, réels et potentiels ?

Prix : Parce qu’il est un instrument de tarification tels que le taux d’intérêt, solde minimal, les frais et les commissions etc.

Processus : Sous ce rapport il doit être un processus opérationnel nécessaire pour une activité spécifique, sous une forme standardisée qui peut être reproduite

Place (lieu) : Sur ce plan, le lieu ainsi que le canal par lequel le client accède au produit, soit le canal de distribution et les points de vente est extrêmement déterminant dans la qualité de l’offre de produit.

Personnel : Ensuite, les ressources humaines impliquées nécessitent des formations et un besoin d’accompagnement et de coaching pour plus d’efficacité et de sécurité dans le front of office etc.

Présentation : En plus, le design ou les supports physiques du produit (par exemple brochures et formulaires) font partie de la qualité de l’offre.

Promotion : Enfin, les campagnes publicitaires et mesures marketing destinées à attirer l’attention du marché cible sur le produit et à promouvoir les ventes.

Outre le paiement mobile, on a constaté aussi l’essor des activités du marché de transfert d’argent avec l’avènement de Wari, Joni Joni, entre autres. Comment analysez-vous l’évolution de ce marché ?

Il faut souligner d’abord que le transfert d’argent est un service financier qui est accessible pratiquement à tout le monde, en ce sens qu’il ne nécessite pas d’avoir un compte dans une institution financière pour pouvoir l’utiliser. Ainsi, aujourd’hui, on peut constater que ce marché de transfert d’argent au Sénégal a connu de nouveaux opérateurs comme les sociétés de téléphones mobiles autres que des sociétés spécialisées comme (Western Union, Money Gram etc.) qui offrent des services de transfert de fonds où les transactions sont effectuées en espèces. Ils offrent leurs services en partenariat avec les institutions financières ou à travers des agents indépendants autorisés. Cependant, ce qu’il faut déplorer dans ce marché de transfert d’argent, c’est la faible transparence dans la tarification, car les coûts liés aux prestations sont très élevés par rapport à la qualité du service fourni. Et sous ce rapport, l’Etat avec les autorités monétaires peuvent s’appuyer sur ce marché de transfert d’argent pour en faire un véritable instrument d’incitation à la valorisation des transferts de fonds surtout des immigrés dans des investissements productifs. Il peut aussi, à partir de ces statistiques financières, développer de véritables politiques de ciblage des personnes à faible revenu dans le but d’améliorer davantage les politiques de solidarité nationale, comme par exemple la Bourse de sécurité familiale (Bnf), la Couverture maladie universelle (Cmu), l’emploi des jeunes… Les transferts d’argent à l’intérieur du pays se font le plus souvent par le canal d’un agent indépendant, ou par des moyens informels (famille, proche etc.). Le téléphone portable vient au troisième rang et devance les institutions financières et la Poste pour ce type de service.

Autrement dit, les opérateurs de transferts d’argent qui dominent le marché local au Sénégal sont aujourd’hui Wari malgré la baisse des tarifs Western Union, Money Gram et Money Express par l’entremise des banques et des Institutions de microfinance avec qui ils signent des conventions de partenariat. Par ailleurs, la loi permet à une banque ou une Imf détenant un organe financier de disposer des services de plusieurs opérateurs de transferts. Au Sénégal, les banques constituent les interlocuteurs directs des opérateurs de transfert d’argent. Cependant, elles ont un rayon d’action très limité car elles ne couvrent qu’environ 8% de bancarisation et leur couverture géographique reste encore très faible dans le pays.

Pour pallier ce déficit, les banques nouent des partenariats de plus en plus avec des institutions de micro-finance (qui sont utilisés comme des sous-agent de transfert d’argent) pour atteindre certaines couches de la population et bénéficier de leur présence dans les zones rurales les plus reculées. On note cependant des forces et faiblesses liées aux types de transfert. Il faut relever que les transferts d’espèces à espèces restent encore dominants sur le marché des envois de fonds. Toutefois, grâce à des partenariats forts entre les Opérateurs de transfert d’argent (Ota) et les banques du côté des expéditeurs, et les institutions de micro-finance du côté des destinataires, l’impact des transferts d’argent peut être optimisé en offrant aux expéditeurs comme aux destinataires des opportunités de bancarisation et d’accroissement des actifs grâce aux comptes d’épargne. Par contre, les transferts d’argent via le mobile n’arrivent pas à servir comme moyen d’accès au crédit bancaire au Sénégal. En plus, il n’existe pas une approche unique et idéale de partenariat (partenariat simple ou partenariat multiple), car chaque prestataire peut déterminer le type de partenariat commercial qui lui convient le mieux pour réussir dans ce domaine.

A votre avis, qu’est-ce qui explique les contraintes liées au développement de l’inclusion financière soutenu par l’éclosion de la téléphonie ?

Il est important de définir et d’expliquer l’inclusion financière en apportant au préalable quelques précisions sur la notion d’exclusion car lorsqu’on parle d’inclusion financière, c’est parce qu’il y a exclusion financière. Il faut noter que l’exclusion financière est le fait des personnes qui ne font pas recours aux systèmes financiers, ni formels ni informels. Et cette situation concerne la majorité de la population au Sénégal et généralement dans tous les pays de la zone monétaire ouest africaine. Autrement dit, il faut comprendre que l’exclusion implique ici une limitation de l’accès aux services financiers liée à l’identification par les institutions financières, notamment les banques de risques spécifiques et de coûts de transaction plus élevés. Alors, l’inclusion financière est un concept multidimensionnel qui se définit par un accès permanent de la population civile à une gamme de produits et services financiers offerts par des institutions financières formelles et pérennes, régies par une réglementation adéquate, diversifiés, abordables et adaptés aux besoins de la population et utilisés par celle-ci dans le but de contribuer à l’amélioration de ses conditions de vie socio-économiques.

Au regard de cette définition, il s’agit maintenant de s’interroger sur les différentes problématiques d’inclusion financière au Sénégal. Il faut souligner que les contraintes à l’inclusion financière sont nombreuses, diverses et variées aussi bien du côté de l’offre (des institutions financières) que de la demande (clients). En effet, il est constaté, de façon générale, que la demande d’inclusion financière reste encore très faiblement prise en compte dans l’ensemble des pays de la zone Uemoa, particulièrement pour une certaine catégorie de personnes, notamment la population rurale, les jeunes, les femmes et les micros et petits entrepreneurs etc. Du côté de la demande, l’une des principales contraintes majeures soulevées dans plusieurs études est liée à l’absence ou à la faiblesse des revenus des populations, ce qui limite considérablement leur capacité d’épargne et de crédit. En plus, il s’y ajoute également, entre autres, le manque d’information et de confiance vis-à-vis des institutions financières ainsi que le manque de structuration de la demande et de sa solvabilité qui constituent des contraintes à l’inclusion financière.

À l’inverse, du côté de la demande, les contraintes au niveau de l’offre peuvent se situer à plusieurs niveaux. D’abord, au plan de la réglementation, des améliorations doivent être apportées, notamment en ce qui concerne le cadre de supervision des activités du mobile banking et du paiement électronique, car il n’existe pas encore un cadre de supervision formel qui prend en compte la diversité des acteurs et des types d’acteurs à surveiller. En effet, si les émetteurs de monnaie électronique sont supervisés par la Bceao, il n’en demeure pas moins de relever qu’il n’existe pratiquement pas une réglementation sur les détaillants/agents, ce qui favorise aujourd’hui le développement des réseaux avec des difficultés de contrôles sur les fraudes et la vérification des niveaux de liquidité.

Vu la floraison des services financiers à travers la téléphonie mobile. Existe-t-il réellement un cadre réglementaire dans notre pays régissant le fonctionnement de ce secteur ?

Oui, évidemment, il existe un cadre réglementaire lié au paiement électronique. C’est l’instruction relative à l’émission de monnaie électronique qui autorise ce type d’instrument de paiement et d’identification des établissements émetteurs ou distributeurs de monnaie électronique. Sous ce rapport, les institutions de micro-finance peuvent émettre de la monnaie électronique, moyennant une autorisation de la direction nationale de la Bceao avec notification au gouverneur. Pour les banques, un avis de non objection est requis et pour les établissements de monnaie électronique, un agrément.
Il faut rappeler à ce niveau que l’autorisation des institutions de micro-finance d’exercer des activités d’émission et de gestion de monnaie électronique est assujettie à plusieurs conditions. Elles doivent disposer d’un capital social ou d’un dépôt de 300 millions FCfa, signer des contrats de partenariats, établir des études financières avec des impacts sur la situation financière de l’institution de micro-finance, enfin avoir un dispositif technique permettant d’assurer ainsi l’authentification, la confidentialité, l’intégrité. En outre, il faut noter que les exigences de la Bceao par rapport aux agents et sous-agents conventionnés portent notamment sur la traçabilité et le remboursement de la monnaie électronique.
A ce niveau, soulignons que la réglementation a une définition très précise d’un établissement émetteur de monnaie électronique et les réseaux d’agents ne peuvent outrepasser leur rôle d’agents d’intermédiaires. Il s’agit des tâches comme : le renforcement de la clientèle par l’acquisition de nouveaux clients, le paiement par voie de transfert d’argent, la distribution de paiement prépayé et l’acceptation de moyens de paiement sous la supervision de l’agent émetteur. Donc il est du ressort des établissements financiers et bancaires de mettre en place des procédures de gestion administrative financière afin de préserver leur image et réputation, et également de ne s’exposer aux sanctions de la Bceao en cas faute ou de manquement.

Malgré ce dynamisme noté dans les secteurs du paiement mobile et du transfert d’argent par le téléphone, des citoyens peinent encore à accéder à ces types de services financiers. Que faut-il faire pour combler ce gap ?

Il faut aujourd’hui favoriser le développement de paiement électronique comme par exemple la digitalisation des paiements des prestations sociales, des impôts et le secteur de la distribution. Et je dis que cela est possible grâce au développement très avancé des Tic. Mais cela passera, entre autres, nécessairement par des préalables comme la promotion d’une véritable avancée économique et financière des populations. Et d’ailleurs, à ce titre, certaines organisations internationales comme le Fonds d’équipement des Nations unies pour le développement (Uncdf), à travers son programme Mobile money for the poor, aident à la mise en place de solutions digitales dans le but d’améliorer l’accès aux services financiers des personnes exclues et des micro-entreprises. Ensuite, aujourd’hui, il faut envisager plusieurs actions importantes comme, premièrement, la dématérialisation des modes de paiement, le développement de l’inter-bancarité, ce qui permet de réduire les comptes dormants ou inactifs et améliorer le portefeuille client des banques. Enfin, il est essentiel de mettre en place un réseau élargi plus adapté aux contraintes et difficultés d’inclusion financière.

Propos recueillis par Abdou DIAW
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